Le haut potentiel intellectuel chez les jeunes

Le haut potentiel chez les enfants, adolescents et jeunes adultes.

Voici un de mes domaines d’activité important, cependant pourtant loin de constituer un trouble en lui-même ! Haut potentiel, doué, intellectuellement précoce, surdoué, zèbre… Cela vous dit quelque chose ? Sans doute, mais commençons par faire le tri dans tout ce vocabulaire…

Le vocabulaire du haut potentiel

Démarrons avec doué ou surdoué : être quantitativement bien intelligent facilite très probablement le développement d’incroyables habiletés, mais probablement pas autant que les rencontres et les chances d’une vie ! Ainsi, cette idée de surdouance ou de douance tend maintenant à être un peu mise de côté, ne rendant pas toujours compte de la réalité du quotidien des personnes avec haut potentiel intellectuel. Je ne vous parle même pas des termes de génie ou prodige…

Maintenant, passons à la précocité, qui renvoie à l’idée d’avance. A priori, on peut envisager cela chez l’enfant, qui serait en avance par rapport à d’autres pour son âge. Mais on voit vite la limite de cette idée à l’âge adulte. Si une avance peu apparaître dans des milieux très stimulants, un langage apparu tôt et avec une certaine richesse n’est pas forcément synonyme de capacités d’élaboration ou d’abstraction atypiques plus tard – quand bien même c’est un bon départ ! De même, une avance scolaire ne s’explique pas forcement par un haut niveau d’intelligence – peut-être juste une pression, de nombreuses stimulations et des exigences parentales importantes !

En réaction à toutes ses appellations, l’idée de zèbre se pose en surnom-mignon à cette cacophonie de terminologies par ailleurs plus ou moins connotées.

Finalement, le haut potentiel, ou HP, est une terminologie plus simple, relevant d’un niveau d’efficience générale au-dessus de la moyenne d’après le test de QI : le potentiel est important, reste à réunir des facteurs personnels et environnementaux permettant l’expression de cette chance.

Haut potentiel : chance ou fardeau ?

Restons encore un peu sur le vocabulaire du haut potentiel. Certains évoquent la notion de haut potentiel à profil complexe, souvent dyssynchrone, versus à profil liminaire. Le premier s’approche de la caricature de l’HP, vu comme très atypique, émotionnellement instable ou en souffrance, tandis que le second relèverait d’un haut potentiel plus caméléon et bien dans ses bottes. Difficile à dire s’il existe vraiment deux types de haut potentiel ou s’il n’existerait pas, plutôt, des personnes HP atypiques, émotionnellement instables ou en souffrance, comme il existe des personnes atypiques, émotionnellement instables ou en souffrance sans HP ! Cette dernière hypothèse est d’ailleurs plus proche de ce que je peux constater régulièrement dans mon travail.

Un livre que je recommande aux parents appuie mon expérience à partir d’une revue de la littérature : les surdoués ordinaires. Le travail de l’auteur, psychologue, est à la fois très sérieux, précis et accessible au grand public.

Reste tout de même qu’un très haut ou très très haut potentiel intellectuel est susceptible d’avoir des conséquences importantes sur l’intégration sociale, et de facto, sur le développement de la personnalité. Quand un petit de 4 ans accède à l’idée que l’espace et le temps sont deux dimensions illimités dans lesquelles nous pouvons nous mouvoir et m’en cause en détail avec grand plaisir, je n’ose imaginer ce dont il aurait envie de discuter avec ses petits camarades de classe… Si globalement, avoir un haut potentiel intellectuel est plutôt une chance, dans certains cas très rares de très très haut potentiel, le retentissement peut être vécu comme un lourd fardeau.

Quand parle-t-on de haut potentiel ?

Sans doute lirez-vous quelque part sur la toile que le QI n’est pas suffisant. Effectivement, si les tests de QI permettent d’appréhender l’intelligence verbale, visuo-spatiale et logique, ils n’évaluent pas l’intelligence créative, musicale, interpersonnelle, intra-personnelle, naturaliste ou corporelle… Notons aussi que la fiabilité d’un test de QI est relative dans la petite enfance. En sommes, vous aurez une bonne idée de la taille adulte de votre enfant vers l’adolescence, mais à la naissance, rien n’est bien sûr… C’est un peu le même principe pour le QI !

Il n’en reste pas moins que la définition la plus répandue parmi les chercheurs et les praticiens est celle fondée sur le QI. Aujourd’hui, un individu est haut potentiel si son QI dépasse 130 avec un test de QI « à jour ». Ce seuil de 130 correspond  par symétrie à la définition de la déficience intellectuelle (QI inférieur à 70). Ainsi, d’après les courbes statistiques, seuls 2.2% de la population peuvent être considérés comme HP d’après cette limite.

Néanmoins, les psychologues n’utilisent pas tous cette définition. Certains changent de seuil. Ils prennent alors comme limite 125 – 5% de la population est alors HP. D’autres ajoutent des critères. Par exemple, ils prennent en compte les résultats scolaires ou la créativité – mais sur la base de quels tests sérieux ? Tels autres en assouplissent la définition. Ils définissent le haut potentiel dès lors qu au moins un des trois indices d’intelligence dépasse 130 – on a alors facilement 5% de la population qui devient HP.

Quoiqu’il en soit, le test permet d’appréhender le fonctionnement de la personne à un moment donné, de situer sa performance par rapport à la moyenne des personnes de son âge, sans nécessairement faire appel à une notion de HP ou autre étiquette.

Quels éléments peuvent évoquer un haut potentiel ?

lien inventaire HPPlein ! Et parfois rien…

L’idée d’une grande curiosité, d’une forte sensibilité émotionnelle et morale, d’un haut niveau d’activité général, ou encore d’une tendance aux questionnements existentiels sont souvent repris dans la littérature sur le haut potentiel – mais pas toujours retrouvés. Bref, la règle est qu’il n’y en a pas en dehors de l’impression d’une bonne vivacité intellectuelle.

Il existe cependant des inventaires qui répertorient quelques éléments fréquents, bien que pas systématiquement présents. L’inventaire de Terrassier est assez intéressant en première intention si vous vous questionnez. Vous pouvez d’ailleurs cliquer sur le picto à côté pour le retrouver.

Quelle scolarité pour un enfant ou un adolescent haut potentiel ?

Bons nombres d’enfants HP s’adaptent très bien à une scolarité ordinaire, sans aucun aménagement particulier. D’ailleurs, j’en profite pour souligner qu’on entend souvent qu’une large proportion d’enfants HP serait en échec scolaire. C’est en moyenne vrai pour ceux qui sont testés, repérés et qui entrent dans la grande majorité des études sur le sujet. Mais s’ils sont testés, c’est bien souvent pour des raisons qui constituent ensuite le biais méthodologique majeur de ces études !

Il n’en reste pas moins, que certains enfants avec haut potentiel intellectuel sont effectivement en grande difficulté scolaire. Il est important dans ces cas de ne pas méconnaître un DYS- ou un TDA-h. Ces troubles passent souvent inaperçus chez un élève qui comprend pourtant si bien… Sans oublier qu’ils sont parfois mis sur le compte d’une fainéantise par la maîtresse.

Parfois aussi, l’ennui en classe et la peur d’une sous-stimulation peuvent poser la question d’un saut de classe. Mais outre la capacité à s’adapter à un saut du programme scolaire, il n’est pas toujours simple de s’ajuster, en termes de maturité et de centres d’intérêts, aux exigences de l’intégration de groupes de jeunes plus âgés, surtout si on est de petite taille ou affectivement immature par exemple… Ces dispositions nécessitent de peser sérieusement les bénéfices et les risques. La procédure du QI-compensé de Terrassier apparaît comme un outil pertinent dans cette réflexion, mais reste insuffisante.

L’enrichissement, l’approfondissement ou le tutorat sont aussi des réponses adaptées aux HP. Aussi, ces réponses apparaissent généralement bien plus faciles à mettre en place en classe.

Gérer le quotidien

Certains jeunes avec HP sont faciles à vivre, avec d’autres c’est une toute autre histoire ! Tous les enfants, qu’ils soient HP ou pas, sont plus ou moins filous, provocateurs, affirmés, dominants, excessifs… Mais dès lors qu’un enfant à un caractère « trop » et qu’il présente en plus un HP, il a clairement plus de moyens qu’un jeune non-HP pour aller au bout de ces envies et c’est parfois vite très difficile à la maison. Il est alors possible de s’orienter vers un professionnel. Aussi, dès lors que les difficultés débordent de la maison, il est nécessaire  consulter.

Il est important de noter que ces jeunes peuvent non seulement présenter un HP, mais aussi un autre trouble. Il est possible de présenter à la fois un HP et TDA-h, Asperger, TOP, trouble anxieux, TOC… Dans ces situations, il est important de ne pas tout mettre sur le compte du HP. Cela permet de pouvoir prendre la mesure de problématique et avancer.

Aussi, tout n’est pas à considérer comme un trouble. Par exemple, un enfant très en avance de 4 ans peut avoir beaucoup de questions sur la sexualité sans que cela ne soit en lien avec une perversion ou la vision d’images inadaptées à l’âge : il a juste compris plus vite que la moyenne certaines choses en regardant un documentaire animalier, et pose des questions pour bien comprendre – mais l’enfant n’a alors pas encore la maturité affective pour comprendre que ses questions sont peu adaptées à son âge ou à la situation dans laquelle il questionne les adultes.

Bref, avoir un enfant avec HP n’est pas toujours de tout repos. S’orienter vers un professionnel peut être pertinent pour trouver des pistes de soutiens.

Pour finir, 5 idées reçues fréquentes…

Il n’est pas HP, il ne réussit pas en classe ! Évidemment, la réussite, à l’école ou ailleurs, ne dépend que du QI… Pas de comment l’on se sent, de la contenance de sa famille, de son état de santé, de son histoire de vie… Bref, certains enfants HP sont effectivement en échec scolaire.

Les HP ont tous d’énormes problèmes psychologiques et/ou scolaires. Non et vous pouvez vous fendre d’un ctrl+f « biais méthodologique » si vous avez lu en diagonale la section précédente !

Un HP est un enfant sur-stimulé par ses parents. La sur-stimulation n’est ni suffisante, ni nécessaire pour être HP. Un enfant HP peut donc être sur-stimulé, mais au même titre qu’un enfant avec un potentiel dans les normes !

Le haut potentiel, c’est une invention de parents riches ! Il faut bien accorder qu’un test de QI nécessaire pour parler de HP a un coût. Et qu’un haut niveau socio-économique semble faciliter l’accès à une certaine nourriture intellectuelle… Néanmoins, j’ai bien évidemment rencontré des HP issus de parents « pauvres » !

Ne disons pas à loulou que le test va dans le sens d’un HP. Il prendrait la grosse-tête ou pourrait se mettre la pression. Certes, rien n’est impossible ! Mais l’enfant comprendra vite que les exercices proposée par la psychologue, ce n’était pas juste pour l’occuper quelques heures… Alors autant en discuter ouvertement, tout en lui précisant les limites du test de QI et de cette idée de HP !